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Et si je vous demandais de me citer le nom des listes sur lesquelles vous aurez à vous prononcer dimanche dans votre commune ?
Non ?
Ça ne vous revient pas ?
Vous ne m’étonnez pas : elles ont été conçues pour ne rien dire ! Pourquoi la mémoire s’encombrerait-elle de syntagmes dépourvus de sens ?
Vous rêviez de lire le livre des listes détaillées du 15 mars 2020 édité par la Préfecture de Seine et Marne ? Inutile : je l’ai compulsé pour vous. (Pourquoi la Seine et Marne, me direz-vous ? La raison est sans doute à chercher dans le tropisme local propre aux municipales…)
Au palmarès des noms dont le sens est aux abonnés absents, on trouvera la passion des adverbes, qui indiquent le rassemblement et l’avenir, comme Provins Ensemble ! ou Avon demain.
Au festival des titres à la signification creuse, l’impératif tient lieu de volontarisme, ainsi qu’on le voit dans Agissons ensemble pour Boutigny et Ensemble poursuivons (Trésigny).
Sur le podium des étiquettes qui ne disent rien, l’infinitif fait office d’une injonction plus modérée. L’ordre passe mieux avec Bien vivre Bailly ou Écrire ensemble un meilleur Bussy.
Parfois, deux adverbes valent mieux qu’un, car au lieu d’en exprimer deux fois plus, on en dit deux fois moins. Peut-être était-ce la visée secrète des concepteurs de Ensemble, partageons demain (Mormant.) ? Je leur suggère, pour ma part, des formules encore plus englobantes et encore moins disantes comme L’Avenir est pour demain ou Ensemble, nous serons plusieurs. Ah ! Pléonasme, quand tu nous tiens…
On le voit : la difficulté, pour une liste « sans étiquette », est que l’Institution lui demande un nom, alors qu’elle souhaiterait tant ne pas en avoir, histoire de dépolitiser totalement l’élection pour mieux ratisser large. Des listes comme Torcy, cause commune, 100% de gauche ou Lutte Ouvrière, faire entendre le camp des travailleurs (Melun), sont des exceptions.
Élection locale ? objecterez-vous ? Non pas ! N’oublions pas que nos conseillers municipaux et conseillères municipales éliront des sénateurs ou des sénatrices qui se présenteront sous la bannière de partis nationaux, et que les électeurs et électrices ont le droit de savoir vers qui la sensibilité politique d’une liste se portera.
En attendant, les candidats et candidates aux responsabilités municipales seraient bien inspirée-es de se pencher avec plus de soin sur leur slogan, qui est leur carte de visite pour de nombreux électeurs et de nombreuses électrices.
Qui trop embrasse, mal étreint, comme dirait l’autre.